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Découverte

Le Nord et l’espéranto, une longue histoire

Esperanto Aktiv n° 38 – juillet-août 2013

Le congrès mondial d’espéranto vient tout juste de s’achever à Reykjavik en Islande que l’on prépare déjà activement l’édition de 2015 qui aura lieu à Lille, dans le nord de la France. À cette occasion, Espéranto-aktiv’ va faire un tour d’horizon de cette région située aux portes de plusieurs pays, ce qui lui donne un intérêt tout particulier pour la langue internationale. Cet attrait ne date pas d’hier et nous allons remonter le temps jusqu’en 1905 pour vous présenter l’histoire de l’espéranto et de la région Nord-Pas-de-Calais, ses grands hommes, son mouvement associatif et sa culture. C’est parti...

Terre de congrès

L’événement annuel le plus important de l’espéranto est sans aucun doute le congrès de l’association mondiale d’espéranto U.E.A.. Il a lieu chaque année dans une ville différente, à quelques rares exceptions pendant les deux Guerres mondiales, et se prépare plusieurs années à l’avance. Cette tradition des congrès mondiaux remonte à 1905, date à laquelle le premier congrès a vu le jour grâce à Alfred Michaux, espérantiste français qui a organisé la première édition à Boulogne-sur-Mer.

À cette occasion, Ludovic Zamenhof, père de l’espéranto, a fait ce discours qui restera dans la mémoire collective : « Ni konsciu bone la tutan gravecon de la hodiaŭa tago, ĉar hodiaŭ inter la gastamaj muroj de Bulonjo-sur-Maro kunvenis ne francoj kun angloj, ne rusoj kun poloj, sed homoj kun homoj. » (Soyons bien conscients de la gravité de ce jour, car aujourd’hui au sein de l’accueillante Boulogne-sur-Mer ne sont pas réunis des Français et des Anglais, ni des Russes et des Polonais, mais des Hommes avec des Hommes). C’est également à l’occasion de ce congrès que fut rédigée la déclaration de Boulogne qui rappelle que l’espéranto n’est la propriété de personne.
Pendant tout le XXe siècle, de nombreux congrès auront lieu dans la région Nord-Pas-de-Calais, notamment une série de congrès que l’on appelle les « Markola Kongreso » (congrès du détroit de mer) qui rassemblent les 4 pays bordant le détroit séparant la Manche de la mer du Nord, à savoir la France, la Belgique, le Royaume-Uni et les Pays-Bas. L’utilisation de l’espéranto se prête particulièrement bien à cet environnement multilingue.
En 2005, un grand congrès interassociatif a permis de célébrer le centième anniversaire du premier congrès de Boulogne-sur-Mer. Ce congrès a réuni les deux principales associations françaises, SAT-amikaro et Espéranto-France, ainsi que des associations spécialisées comme celle des cheminots (AFCE), des jeunes espérantophones (JEFO), des catholiques, de la fédération espérantiste du travail, l’association britannique d’espéranto et celle de la ligue flamande d’espéranto.

Place des grands hommes


Le Nord-Pas-de-Calais est également une terre qui a vu grandir des personnes ayant joué un rôle marquant dans l’espéranto. Nous avons déjà parlé d’Alfred Michaux sans qui le premier congrès n’aurait pas eu lieu (ou du moins pas à Boulogne), mais il faut également citer d’autres grands noms comme Émile Grosjean-Maupin à qui l’on doit un travail titanesque de lexicologue. Il a rédigé deux dictionnaires : le premier, espéranto-français, en 1910 et le second, français-espéranto, en 1913. Mais il a surtout dirigé le travail du Plena Vortaro de Esperanto (dictionnaire complet d’espéranto) en 1930. Entièrement rédigé en espéranto, il est la référence pour les espérantophones.
La deuxième édition de ce dictionnaire a été rédigée quelque quarante années plus tard, par un autre espérantiste du Nord, Gaston Waringhien, et si le travail considérable fourni pour cette deuxième édition classe Gaston Waringhien parmi les lexicographes les plus célèbres du monde de l’espéranto, il ne faut pas oublier son travail de traducteur, d’écrivain et de poète.
D’autres espérantistes de cette région méritent également d’être cités, comme Hervé Gonin, à qui l’on doit la traduction des deux derniers albums de Tintin édités en espéranto (Tinĉjo en Tibeto et La templo de l’suno), et Michel Dechy qui s’est beaucoup investi pour la réalisation de ces deux albums. Ce dernier est également l’auteur d’un support de cours pour apprendre (et enseigner) l’espéranto à travers des planches d’albums de Tintin : Bildstrioj kiel lernolibroj.
Citons également deux présidents récents de l’association Espéranto-France, Claude Longue-Épée et Xavier Dewidehem qui ont chacun beaucoup apporté à l’association par leurs expériences et leur sensibilité respectives.

Une multitude d’associations

Le Nord-Pas-de-Calais est l’une des régions les plus peuplées de France, aussi est-il normal que nous y retrouvions beaucoup d’associations. La plus importante est certainement l’association de l’agglomération lilloise, Lille-Villeneuve-Espéranto qui organise des cours et des stages, se réunit régulièrement et fait connaître l’espéranto dans quelques écoles de l’agglomération.
La fédération régionale, Espéranto-Nord, présente un panorama des différentes associations sur son site internet. La fédération diffuse également une revue La Norda Gazeto qui permet de s’informer de l’actualité de l’espéranto, elle organise également un rendez-vous annuel à Stella-Plage qui s’articule tous les ans autour d’un programme riche, composé de cours pour débutants et non-débutants, de concerts, spectacles et différentes activités touristiques.


J’espère que ce petit tour d’horizon vous aura donné envie de venir découvrir cette région et de prendre rendez-vous pour le congrès mondial de 2015 à Lille.