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« Superbazaro », de Martin & la Talpoj
Esperanto Aktiv n° 58 – mai 2015
Martin Wiese a fait languir son public 7 ans avant de sortir son nouvel album Superbazaro. Il n’est donc pas étonnant qu’Esperanto-Aktiv’ ait mis 6 mois pour vous en parler ! Le disque, paru chez Vinilkosmo, étant disponible depuis le 6 décembre 2014, il a eu le temps de montrer la place incontournable tenue par Martin Wiese dans le paysage du rock espérantophone.
La carrière de Martin Wiese en Espérantie a commencé à son entrée dans le groupe Amplifiki au mitan des années 1980. Cela fait donc de lui un des pionniers du rock espérantiste encore en activité ! Il participe aussi au groupe suédois Persone, en sommeil depuis le début des années 2000 et se distingue en composant et en chantant seul dès les années 1990.
L’année 2007 est celle du premier album solo pour Martin Wiese, (Pli ol nenio). Attention, il reste un chanteur amateur : son métier, rappelle-t-il au détour d’une interview de l’époque, est architecte. Mais son besoin de chanter en espéranto n’a pas disparu depuis l’impossibilité géographique pour les membres de Persone de répéter. Alors pour la musique, il s’est entouré d’un groupe variable, de soutiens et d’amis, les « taupes ». Son groupe prend donc naturellement le nom de Martin & la Talpoj (Martin & les Taupes).
Toutefois, Martin a du mal à motiver les « taupes » pour donner un concert loin de leur taupinière. Il a donc donné des concerts à Paris et Toulouse, sous la dénomination Martin sen la Talpoj (« Martin sans les Taupes »).
Dans un concert acoustique sans les Taupes, Martin Wiese affirme qu’il lui manque leur soutien, leur aide, leur force. Mais il sait apprécier la plus grande proximité du public, la communication plus importante et reconnait que ces textes sont alors plus faciles à comprendre pour les auditeurs.
Le style pop-rock très personnel reste constant depuis les compositions pour le groupe Persone. Martin assure qu’il est resté fidèle à lui-même : il n’a mis là aucune intention particulière. Et les amateurs éclairés savent déjà que ce style va du folk acoustique le plus doux jusqu’au rock alternatif le plus débridé.
Le dernier album de Martin, Superbazaro, ne fait pas exception. Ses 14 chansons, toutes inédites (à l’exception de Sub la ponto et Nova jaro, sorties en avant-première sur Internet, mais retravaillées sur l’album) sont un subtil mélange entre le tendre intime et l’énergique électrique. L’auditeur est remué dans ses tripes grâce aux mélodies puissantes et à la poésie de haut niveau. De plus, la couleur du son s’enrichit de la participation de musiciens d’exception invités, tels que Ĵomart Amzejev (de Ĵomart & Nataŝa), Éric Languillat (de Inicialoj DC), Anders Grop (de Persone), etc.
Au fil des chansons, les thématiques varient.
Martin Wiese ouvre sur des paroles un peu mystérieuses (En akordo) pour clamer son harmonie (temporaire ?) avec le monde. Puis il se pose une question fondamentale dans le rapport à autrui : « Où es-tu ? » (Kie estas vi ?). Un peu plus loin, il fait souffler un vent nouveau sur notre vieil « hymne » La Espero, utilisé comme référence dans la chanson Nova sento, sur une mélodie plutôt folk et acoustique : « En la mondon vere venis nova sento ».
Ceux qui croient encore au prince charmant seront désillusionnés par La Princino, un conte, mais pas « de fées ».
Martin nous mène aussi sous les ponts (Sub la pontoj) pour un verre entre amis ou au-dessus des ponts, dans la nuit après l’été (Postsomero (super la pontoj)). Il nous parle des sentiments et du temps qui passe avec les mots justes.
Et partout sonnent de précieux mots un peu rares qui reflètent toute la poésie de Martin ; on peut même lui reprocher quelques néologismes de bon aloi.
Sur YouTube, vous pouvez retrouver deux clips officiels de Martin Wiese.
Le premier clip ne montre que des images de Martin et des taupes. Sur une mélodie rock-folk qui évolue d’une simple guitare vers un final électrique, Gefratoj raconte la nostalgie pour une amitié passée ; Martin chante ici de sa voix de tête, des sons flûtés.
La chanson titre de l’album, sans conteste un tube, est illustrée par la seconde vidéo, également réalisée par le fameux DJ espérantiste brésilien Roĝer Borĝes. Dans Superbazaro, le garçon s’offre à la fille comme les marchandises d’un supermarché. Les images ont été filmées dans les rues et dans une grande surface d’Huesca, en Espagne, en marge d’un festival international ; elles sont mélangées à des extraits de films, des références culturelles qui se déroulent dans le contexte du supermarché (Mary Anne Goes to the Market, Moskvichka, Lost). « Durant la composition, a confié Martin Wiese, j’ai de nouveau senti cette alchimie entre la musique et les mots. Je suis sûr que ça transparait dans le clip. »
Sorti le 6 décembre 2014, l’album Superbazaro de Martin & la Talpoj est disponible sur le site du producteur, Vinilkosmo.
Le CD est disponible au prix de 16,50€.
Le format mp3 est disponible au prix de 10€.