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Vous recherchiez la génération perdue ?

La Perdita Generacio : Ĉiamen Plu
 - S’étant fait attendre cinq ans, le troisième album du groupe suédois (LPG) a été lancé officiellement lors de la rencontre SES 2013, en Slovaquie, sous le titre Ĉiamen plu (qu’on pourrait traduire par : « pour toujours et sans cesse » mais aussi par : « constamment vers cet amour »). Le groupe fêta du même coup ses dix ans.
Nous n’avons pas été déçus par ce à quoi LPG nous a habitués : des mélodies accrochantes, des rythmes tantôt dansants, tantôt berçants, des arrangements très acoustiques, et surtout des textes subversifs comme nous les aimons, inspirés par l’amour du (bon) sens. Mais nous y avons également relevé quelques surprises. D’abord, aux chansons signées par Tomas Frejarö (anciennement Tomas Q Nilsson) viennent s’ajouter celles de deux autres musiciens du groupe : Hendrik Lönngren et Anna Burenius.

Et puis, pour la première fois, le groupe a souhaité de toute évidence donner une place toute particulière à la culture française en faisant honneur à deux artistes bien de chez nous : Boris Vian et Platano ! Le premier a été invité à écrire la version originale du quatrième titre de l’album, la Dizertanto. Le second intervient vocalement dans Televido, une chanson grinçante sur le désir fiévreux de passer à la télévision.
Et pour rester dans le thème des choses qui surprennent, nous ne résistons pas à mentionner la grande créativité du groupe qui le pousse à utiliser, çà et là, des mots qu’on ne trouve pas forcément dans les dictionnaires d’espéranto ! Ainsi, dans Ĉiamen plu, vous entendrez les verbes tabasami, ubi, asroni, le pronom personnel ri, le préfixe -iĉ-. Êtes-vous familier de ces expressions ? Non ? Alors voici quelques explications.

La Perdita Generacio
 - https://myspace.com/laperditageneracio

Les trois premiers sont des inventions du groupe. Tabasami veut dire : sourire. Il a été créé à partir du swahili tabasamu. Pour LPG, il y a un manque à combler dans l’espéranto qui au lieu de « sourire » dit : « rire faiblement » (rideti). Le sourire est une faculté humaine qui va bien au-delà d’un simple sous-rire. Ça n’est pas qu’un effet de l’humour mais une marque d’amour. Et ça tombe bien car dans tabasami, il y a ami (aimer).
Le verbe ubi est une invention de Hendrik Lönngren qui a imaginé qu’au volatif participe conditionnel actif (accrochez-vous !), ubi donnerait ubuntu, mot bien célèbre dans le monde de l’informatique libre et qui dans plusieurs langues bantoues pourrait être traduit par « je suis ce que je suis grâce à ce que nous sommes tous » (source Wikipédia). Le terme ubuntu se réfère à tout ce qui se partage indéfiniment « sans se perdre » comme l’information, l’utilisation d’un outil, un programme informatique, un sourire (tabasamo ubindas !)… Nous comprenons donc le verbe ubi comme : « mettre en commun quelque chose qui ne peut nous faire défaut ».
L’intention de départ pour créer le verbe asroni, était d’avoir un équivalent du suédois « fika » qui désigne une pause-café prétexte à se rassembler et discuter. Si « fika » est un élément culturel et social très important en Suède, le mot n’était pas facile à intégrer tel quel dans l’espéranto puisque le verbe fiki existe déjà et désigne une autre façon de se rassembler dans laquelle le café et la discussion n’ont vraiment pas grande importance !… LPG a donc préféré se référer à une autre langue venue d’une culture où il existe la même tradition, l’arabe.
Le suffixe -iĉ- est une proposition désormais bien connue pour atténuer le sexisme de l’espéranto en rétablissant un traitement symétrique des genres : -in- pour les femmes, -iĉ- pour les hommes.
Le pronom ri va plus loin. Il souhaite effacer la dénomination du genre dans le langage. Il est utilisé en remplacement de li et ŝi (il et elle) et propose de ne plus utiliser systématiquement les marques du genre telles que -in-, --, ge-, et de les réserver à des contextes où cela s’avère nécessaire. En la riismo kunvenas ne viriĉoj kun virinoj sed homoj kun homoj ! Ĉu ne ?

Mais peu importe ! Vous n’avez pas besoin d’adhérer de tout votre cœur à ces petits arrangements linguistiques pour apprécier la qualité de la musique et de la langue du groupe et vous laisser transporter par les questions de fond qu’il soulève.

Gijom’ Armide & Anja Eisemann


Sorti en 2013, Ĉiamen plu est un album du groupe La perdita generacio disponible à la boutique d’Espéranto-France.

Pour vous le procurer, vous pouvez contacter butiko@esperanto-france.org. Il est vendu au prix de 15,5 euros, plus 3,50 euros de frais d’envoi. Si vous n’habitez pas en France, vous pouvez également contacter la boutique pour connaître les frais d’envoi vers votre pays.